Au-delà de l’Irréel

08.02.13
Par LRC

La fin des années 60 se prêtait bien à l’expérimentation spirituelle. Les premiers gourous, l’ouverture aux cultures orientales, la découverte du LSD et l’essor du courant psychédélique, mais aussi les débuts de la carrière de Mireille Mathieu : tout cela incitait fortement à l’hallucination.

L’époque étant à la fois festive et ayant une croyance inébranlable dans les bienfaits de la science, de nombreuses expériences universitaires se sont déroulées essayant d’établir un lien scientifique entre l’état hallucinatoire et la télépathie. C’est ainsi que des cobayes humains plongés dans des caissons d’isolation sensorielle ( le sujet flotte dans un cylindre empli d’eau salée, dans l’obscurité visuelle et l’isolation sonore la plus totale ) ont connu des expériences extra-corporelles parfois puissantes.

Les fans de science-fiction se rappelleront avec nostalgie du film du souvent barré réalisateur Ken Russel ( Tommy ), le bien nommé “Au-delà du réel” dans lequel le héros se transforme après avoir pris du Peyotl dans un caisson : il prétend être désormais être le seul président légitime de l’UMP.

Bande annonce originale de “Au-delà du réel” ( Altered States ) – 1980

A l’inverse, un autre phénomène moins connu a été aussi exploré : l’effet Ganzfeld. Au contraire du caisson, on induit l’effet hallucinatoire chez le sujet en le stimulant à l’extrême : allongé avec une balle de ping-pong sur les yeux ( ou bien une jeune Thaïlandaise ) il est muni d’un casque émettant du bruit blanc : une soupe sonore ayant aussi servi lors des séances de torture infligées par la CIA aux détenus de Guantanamo. Le sujet essaie de percevoir des images qui lui sont “transmises” télépathiquement depuis une autre pièce par une autre participant, “l’émetteur”, qui lui se concentre sur une image.

On montre ensuite au “récepteur”, 4 images : celle sur laquelle se concentrait l’émetteur ainsi que 3 leurres. Le reste n’est que statistiques : l’état de transe permet t-il au cerveau de recevoir des informations extra sensorielles ?

Certains résultats se sont montrés plutot intriguants mais comme d’habitude lorsque l’on sort de la sphère cartésienne beaucoup de conclusions sont largement contestées par la communauté scientifique.

Originaires de San Francisco ( évidemment ), le duo de musique électronique Matmos s’est intéressé à l’effet Ganzfeld et l’a utilisé pour une méthode originale de composition pour leur dernier EP. L’un des membre du groupe jouait le rôle de l’émetteur en transmettant des idées musicales. De l’autre coté le receveur décrivait les sensations qu’il éprouvait : des images ( qui sont devenues des ambiances sonores ), des bruits (qui sont devenus des mélodies ), des mots… Le tout s’est déroulé à l’université d’Oxford, l’herbe étant toujours plus verte ailleurs, surtout en Angleterre.

Le résultat aurait pu être aussi prétentieux que la démarche mais il faut bien avouer que le duo californien est sauvé par son talent mais aussi par son humour qui me rappelle DEVO, d’autres allumés qui méritent eux aussi leur chronique. J’aime aussi la video de leur single “Very Large Green Triangles” : de la musique electro-concrète assez jouissive et un design néo-rétro qui sied à l’attaque des triangles verts…

Comme prévu, on hallucine.

Matmos – Very Large Green Triangles (2013, Thrill Jockey Records) – Réalisé par Ed Apodaca & Audrey Karleskind.

 

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