Aux racines du Rastafarisme et du Reggae

16.09.15
Par Juanito
Rastafari The Dreads Enter Babylon

Le reggae est à ce point associé au rastafarisme que cette musique en est devenue sa liturgie, avec partitions et paroles pour saintes écritures, ses chanteurs en devenant les apôtres. Mais le rastafarisme est un mouvement culturel et religieux bien plus vaste et profond que le reggae, un syncrétisme religieux forgé dans les aléas et les rencontres de l’histoire, celle de l’abolition de l’esclavagisme et du couronnement d’un roi d’Ethiopie.

Marcus Garvey

Colonie anglaise jusqu’en 1962, la Jamaïque fut longtemps une terre irriguée du sang des esclaves jusqu’à son abolition en 1833. Alors vint le temps de l’instruction pour certains et l’accès à la lecture de la Bible. Des cendres encore chaudes de l’esclavagisme naîtra une génération de défenseurs de la cause noire. Jamaïcain émigré à Harlem, Marcus Garvey (1887-1940) fut un des précurseurs du Panafricanisme, ardant partisan de l’union des noirs du monde entier. Empreint de culture biblique il voyait dans le sacre du négus d’Ethiopie la réalisation d’une prophétie autant qu’un formidable espoir pour la cause noire.

Bob Marley

Accédant au trône en 1930, Haïlé Sélassié (en photo sur la couverture du disque, pris en 1911 avec son épouse) devient empereur d’Ethiopie, revendiquant même une lointaine filiation avec le roi Salomon. Dans un monde où l’homme noir ne trouve pas sa place et une Afrique dominée par la colonisation, ce roi érudit et charismatique est une lueur d’espoir brillant au-delà des mers, même si les puissances occidentales ont tout fait pour le décrédibiliser à l’époque. Les jamaïcains feront un accueil triomphal au Négus éthiopien lors de sa visite en 1966 dans l’île. Figure mystique du rastafarisme malgré lui, il attisera la foi de communautés religieuses et la ferveur de musiciens. Le reggae naissant de ces années 60 épousait la cause du rastafarisme et se drapait de son étendard vert-jaune-rouge, Bob Marley en devenant son héraut, lion conquérant des ondes. Sélassié – Garvey – Marley, c’est un peu la Sainte Trinité version jamaïcaine…

Une rencontre du reggae et du rastafarisme qu’égraine la compilation Soul Jazz Records, Rastafari : The Dreads Enter Babylon 1955-83. Pour une fois infidèle au mythique label jamaïcain Studio One, la sélection fait appel aux vénérables du roots, de Count Ossie’s à Johnny Clarke en passant par Mutabaruka. Une excellente compilation n’ignorant rien des influences des percussions et rites africains, premières fusions de la musique jamaïcaine avec ses racines, avant que ne viennent ska, rocksteady et reggae.

Rastafari : The Dreads Enter Babylon 1955-83 (2015, Soul Jazz Records)

Count Ossie Rasta Family “Africa We Want Fe Go”

QQ “Betta Must Come”

Johnny Clarke “None Shall Escape The Judgement”

Count Ossie and Leslie Butler “Soul Drums”

La vidéo du très jeune QQ, âgé de 10 ans lors de ce titre, digne héritier des anciens. La qualité de la vidéo n’est pas au top mais les bonnes vibrations sont là!

 

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