Le paysage urbain se diffracte en permanence, des portions de plus en plus larges de la ville quittent la banquise installée et deviennent des icebergs qui partent à la dérive, s’abandonnent à de nouvelles pratiques, de nouveaux usages, produisent une nouvelle esthétique, de nouvelles émotions.
Comment ne pas être séduit par ces environnements austères, à la beauté figée des vieux masques africains polychromes, comment ne pas se mettre à dériver soi-même dans ces endroits étranges et flottants. Un dernier fotowalk dans le coin bien connu des grafeurs, pour l’instant abandonné, mais dont la rumeur veut que ce ne soit plus pour longtemps et que l’invasion éternelle des bobos flingueurs s’en empare à nouveau sous le visage riant de l’agence de com à la pointe. Finie l’expression libre du dimanche après-midi, finie la bonne odeur des bombes de peinture et finie la vastitude désertée.
Tout va de nouveau se millimétrer, la disneylisation est en marche, les bureaux vont réapparaître, les dealers iront plus loin, les chiens aussi, les amoureux dégageront et les mobylettes redeviendront silencieuses, les plantes vertes reviendront, le paysage sera de nouveau paysagé et on repassera de la jungle moite au jardin à la française, tout ira bien, le tiers paysage sera vaincu jusqu’à la prochaine désaffection, crise ou désertification, la ville à son propre global warming et ses propres tempêtes, imprévisibles et brutales.