
En ces temps de soldes, grand moment de communion consumériste dans nos temples d’illusion, replongeons nous en d’autres lieux et d’autres temps, vers d’autres rêves. Ceux d’une génération qui se voyait faire la liquidation totale d’une vieille société pour solde de tout compte…
Né dans le chaudron du Tropicalisme en 1968, «Grande Liquidaçao» est le premier album de Tom Zé. Nous sommes dans les années 60, les militaires ont pris le pouvoir et mettent au pas la société brésilienne. En réaction le Tropicalisme s’affirme comme un vaste mouvement culturel qui trouvera un écho musical dans un pays, riche terroir musical.
Une jeunesse qui goûte peu l’air martial et le métronome des bottes militaires, lui préférant les sons du rock et du psychédélisme venus de lointains horizons où soufflent les vents de révoltes d’autres jeunesses. Tom Zé rejoint donc Gilberto Gil et Caetano Veloso, initiateurs de cette relecture du riche patrimoine musical brésilien.

L’artiste insuffle dans «Grande Liquidaçao» un psychédélisme distordant les lignes des partitions classiques, un univers personnel et créatif dont la modernité raisonne encore à l’écoute bien des décades après. Mais au tournant du Tropicalisme, quand sont emprisonnés ou contraints à l’exil les leaders du mouvement, Tom Zé sombrera dans l’oubli de l’industrie musicale.
Qu’importe ! «J’ai fait comme la semence sous la terre, profitant de la pourriture afin de pouvoir reverdir» on appréciera cette savoureuse citation du musicien. La germination fut longue, il fallut attendre le début des années 90 pour que David Byrne, ex de Talking Head et esthète des musiques latines, ne redécouvre cette fleur sortie du fumier et relance sa carrière. L’excellent label Mr Bongo participe de ce travail en rééditant récemment cette œuvre de jeunesse et de genèse, Eden oublié d’un Brésil aux fruits perdus du groove.
Tom Zé «Grande Liquidaçao» (1968, Mr Bongo)
“Gloria”
“Nao Buzine Wue Eu Estou Paquerando”
“Tom Ze – Quero Sambar Meu Bem”