The American Folk Blues Festival

19.06.08
Par Mille Pattes
American Folk blues Festival

C’est la petite histoire d’une grande déferlante qui allait laisser des traces. Officiellement tout démarre par l’entremise bienheureuse de deux producteurs allemands (hé oui !) Horst Lippmann et Fritz Rau. Constatant que le public européen ignore tout du blues, ils organisèrent une tournée exclusivement consacrée à cette musique.

La démarche est tellement honorable qu’elle nous semble aujourd’hui totalement surréaliste . A l’époque, des producteurs s’employaient donc à faire découvrir ce qui les faisait vibrer au grand public. Souhaitons leur d’être mort avant d’avoir pu découvrir notre désastre contemporain.

Les tournées s’étalèrent sur plusieurs années. Elles firent étapes dans de grandes salles, mais surtout à la télévision. Du coup il nous reste des archives filmées qui font aujourd’hui l’objet d’une généreuse réédition.

Dans les wagons : un joyeux aréopage de gueules cassées, de bluesmen mal dégrossis, culs terreux du delta. Moins sexy tu meurs. Certains n’avaient jamais pris l’avion et leurs regards hagards emprunts d’une panique mal dissimulée sont presque touchants. Fallait-il que ces braves gens aient quelque chose à raconter à ces blancs qui leur ressemblaient si peu ?

muddy waters

Pour un John Lee Hooker ou un Muddy Waters déjà précédés d’une vague réputation chez les érudits qui pouvait connaître alors Brownie McGhee ou Koko Taylor ?

Le public de son côté a des allures compassées effarantes. En 1965 le costume est de rigueur, la gueule d’enterrement aussi. La mèche huileuse est bien plaquée et les applaudissements soigneusement calibrés. En 1968 – pour peu qu’on distingue la salle – on sent déjà un relâchement.

Les prestations télés sont un tantinet naïves notamment dans la reconstitution de décors façon “sudiste” très carton pâte et totalement cheap. (voir vidéo John Lee Hooker)

A un Olympia prêt, la France demeura hermétique à cette déferlante de notes bleues. Elle est comme ça la France. Ceci étant, elle a des excuses, trop occupée qu’elle était à suivre les débuts fracassants et tellement prometteurs d’Alain Barrière.

Les expressions artistiques populaires les plus singulières sont universelles (balaise c’teu phrase ?, j’vais pas tarder à envoyer un cv à télérama …). Cela justifie pleinement la présence de ces musiciens en Europe. Si imparfaites qu’elle soient, si peu ressemblantes à celles mille fois entendues, ces voix lointaines étaient en passe de toucher un public habitué à tout autre chose.

De fait, elles firent des émules au sein d’une jeune génération de musiciens anglais dont l’activité tapageuse ne semble pas vouloir prendre fin aujourd’hui encore.

Il est bien sur impossible de donner ici un aperçu exhaustif des participants.
A titre indicatif : Bukka White , Sonny Terry & Brownie Mc Ghee, Sonny Boy Williamson (plus grand harmoniciste du monde), Koko Taylor, Skip James, Memphis Slim, T Bone Walker, John Lee Hooker, Otis Rush et tant d’autres …

John Lee Hooker “Hobo Blues”

Sonny Boy Williamson “Nine bellow zero”

 

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