É proibido proibir

23.07.08
Par Spellchecker
Tropicalia

Même dans la grande et joviale tribu musicale brésilienne, il arrive qu’on ne se comprenne pas très bien, « Hein ? Quoi Gilberto ?! ». Mais un petit orage vous donne en général un miracle de plus dans l’épatant palmarès discographique venu de ce vaste pays, surtout si celui-ci est tropical.
Tropicália est né à au milieu des années 60 de la volonté de deux hommes : Caetano Veloso et Gilberto Gil, on ne vous les présente plus, de sortir l’horizon brésilien du folk traditionnel, de la bossa nova devenue un peu trop middle class, et d’accueillir les sons libres et déjantés venu d’Amérique et l’Angleterre. Le tout, sous fond de régime dictatorial, voilà de quoi redéfinir l’identité brésilienne par une véritable révolution musicale.

Quand les deux compères expliquèrent à leurs petits copains bossa noviens de Rio (Chico Buarque, Maria Bethânia) que l’avenir musical brésilien se devait de sortir de ses racines traditionnelles, transcender les genres musicaux, aller voir ce qui se fait du côté des ricains et des British pour écraser le nationalisme ambiant, l’enthousiasme ne fut pas franchement débordant. Pour tout dire, on eut un peu de mal à comprendre ce dont diable ils pouvaient bien parler.

Pourtant, rapidement l’école de Bahia fut de la partie et la révolution du son made in Brazil fut bien en route : Os Mutantes, Tom Zé, Jorge Ben, Gal Costa, autant de joyeux compères qui vinrent enrichir le mouvement. Le régime au pouvoir se durcissant à mesure de la ferveur des “Tropicaliens”, nombre d’entre subirent arrestations, emprisonnements et parfois même l’exil. Belle revanche que de penser que Gilberto himself est aujourd’hui en charge du Ministère de la Culture dans le gouvernement Lula.

Il y a quelques années de ça, le Barbican Centre de Londres (à la fois salle de concert, galerie d’art et complexe d’appartements reconstruit des suites des bombardements en pleine City of London) dédiait une exposition rétrospective à l’histoire de “Tropicália” et par la même occasion l’excellent label Soul Jazz Records nous en offrait la délicieuse bande son que voici.

Les présentations contextuelles étant faites, il ne vous reste plus qu’à vous plonger dans l’audace et le bricolage psychédélique des genres qui permirent à ce mouvement de poser les bases de la scène musicale brésilienne actuelle (Maria Monte, Seu Jorge, Bebel Gilberto). Un son qui gratte, hulule, fanfaronne, se casse parfois la gueule. Bref, un son qui tranche avec les sons plus lissés auxquels nos oreilles s’étaient habituées pour finalement ravir la fibre brésilienne originelle qui dort en nous.

Various Artists – “Tropicália – A Brazilian Revolution In Sound” (2005, Soul Jazz Records)

Jorge Ben – “Take it Easy my Brother Charles

Os Mutantes – “Quem Tem Medo De Brincar De Amor

Gal Costa – “Sebastiana

 

3 commentaires

    1. Juanito le :

      Une chronique des plus intéressantes qui nous offre un autre visage de la musique brésilienne, loin des bossa nova parfois doucereuses (bien que j’adore ce style)
      Il est effectivement des plus cocasses de noter que Gilberto Gil fut emprisonné pour rébellion dans les 60′s avant de finir ministre… Je l’ai d’ailleurs vu en juillet en concert à l’Armada de Rouen, toujours aussi groovy le ministre!
      Quant à la compil de Soul Jazz Records, un très bon choix, on y trouve nombre de sélections gorgées de soleil et de créativité brésilienne!

    2. LRC le :

      Toujours meme label, la compil Brazil 70 est aussi intéressante. Dédiée à la période post-tropicalia elle montre l’évolution du son de l’époque et surtout l’influence d’un mouvement qui n’aura duré qu’un an mais aura des répercussions conséquentes sur la musique brésilienne

    3. eliselaura le :

      dire que je l’ai raté en mars, j’avais pourtant des places…on se console comme on peut en se disant qu’une salle en places assises (Cité de la musique) ça a du être sacrément frustrant !

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